Pour répondre a ta question légitime asahi, je préciserai que cette décision n'est pas le résultat d'une injonction juridique. En d'autres termes, nous aurions eu le choix de ne pas bouger le petit doigt et de continuer sur la même voie qu'auparavant.
Mais on s'en doutera, nous n'avons pas pris une décision aussi radicale simplement parce que nous étions d'humeur dévastatrice le jour J. Tout le monde en saura bien assez, bien assez tôt puisque la mode est désormais a l'auto-flagellation sur la scène publique (publications de décisions de justice sur son site marchand + divers journaux + bientôt sûrement la presse people...)
Il est ici question de stratégie a long-terme, de pérennité et de management du risque.
Prenons Google : "peu importe" de signer régulièrement des chèques a des plaignants quand on a une trésorie de plusieurs milliards de dollars, qu'on peut provisionnner a gogo et surtout, qu'il en faut bien plus pour enrayer la machine et remettre en question un business-model entre temps bien ancré dans les mentalités... même celle des juges. Un petit communiqué de presse bien comme il faut a la "don't be evil" derrière et la pilule passe avec le temps. Jusqu'au jour ou a force de lobbying bien placé, le bon juge prendra la bonne décision qui fera jurisprudence et inversera la tendance.
Et bien voila, nous n'avons pas (encore) la chance de pouvoir nous permettre une telle approche.
Ni économiquement parlant, si on part du principe que le marché francais est mené comme une barque indépendante a l'intérieur de Sedo. En clair, il faut (au moins) que le CA généré suffise a couvrir les frais divers - dont font partie les frais juridiques. Or a coup de centaines de milliers d'euros, ca va vite et comme vous le savez, le domaining francophone n'est pas forcément plus grosse la vache a lait dans le pré
Ni en terme de force de frappe générale, dans la mesure où nous ne sommes pas un mastodonte de l'économie mondiale avec tous les réseaux et les piliers qui vont avec (du genre "Sedo prend la parole sur un sujet, Sedo est allègrement repris dans les médias de France et de Navarre")
Par contre, nous avons la chance de pouvoir décider de la direction que nous voulons prendre, aussi bien au niveau global que local. Moi le premier, en tant que chef de marché dont le rôle est d'adapter la stratégie globale aux spécificités locales. Et soutenu par le management Sedo et notre actionnaire principal AdLINK le cas échéant. Non, je ne suis pas aveugle. Oui, je mesure bien les conséquences de cette décision pour certains clients. Mais je pense qu'on ne va nulle part sans convictions et que la route est toute tracée pour ceux qui restent dans l'inaction. Le succès quel qu'il soit passe par des concessions.
Il ne m'est pas possible, et la plupart d'entre vous le comprendront, d'étaler les dossiers juridiques de Sedo sur ce forum ni d'y disserter sur notre stratégie juridique. A ceux qui se posent la question : non, nous ne croulons pas sous les procès, sans quoi il aurait fallu prendre depuis longtemps des décisions bien plus radicales. Nous avons majoritairement des clients francophones propres car partiellement formatés par un environnement qui est ce qu'il est, une stratégie de prévention efficace, des "policies" claires et transparentes, un service juridique efficace et une équipe compétente.
Quelques éléments de réponse toutefois :
- pour tout vous dire, nous n'en serions vraisemblablement pas la si les domainers industriels non-francophones n'avaient pas fait main basse de manière parfois cavalière et irresponsable sur le .fr. Car la plupart des domainers francophones ont une approche beaucoup plus reponsable. Mais la réalité juridique est cruelle : page consultable de France = on assigne en France. Et si le titulaire est dans un paradis juridique, no problem : Sedo casquera pour lui quoi qu'il en soit.
- en tant que principal - et quasiment seul - acteur activement présent sur le marché francais, nous sommes (malheureusement) particulièrement exposés aux regards. Et nous ne tenons pas, contrairement a certains, a faire le choix de la boîte postale a Bélize, aux Caimans ou simplement en Floride. C'est également pour cela que je vois la concurrence d'un si bon oeil. A elle seule, elle contribue a l'éducation du marché car on est davantage amené a se poser les bonnes questions lorsqu'on voit plusieurs personnes manger du même pain
- les juges francais ont encore du mal a saisir les rouages du second marché des noms de domaine et un simple "Sedo vend et parque des noms de domaine" sortant d'un tribunal est pris par argent comptant par la communauté juridique entière.
- on ne demande pas 100.000 euros de dommages et intérêts a un pauvre particulier qui ne s'est jamais fait un centime sur une typo de bas étage. Par contre, s'il y a un intermédiaire (personne morale) a mettre dans le coup, ca devient beaucoup plus crédible et juteux. D'ailleurs, il est fort possible qu'on mette bientot un maillon supplémentaire de la chaîne dans le sac... En tous cas et de la même manière que certains registrars ont construit leur succès sur une stratégie de stimulation de la crainte chez leur public ou la lobotomisation des foules, certains avocats peuvent développer des business-modèles sur l'exploitation des dérives du second marché. Il n'y a pas de mauvaise manière de faire des affaires, que des opportunités a saisir.
- le rôle d'intemédiaire est a ce point délicat qu'on a vu récemment apparaître le cas déroutant où le client Sedo co-accusé se retourne contre nous en disant qu'il nous avait confié la pleine gestion de son portefeuille et que nous avons par exemple démarché des acheteurs pour vendre ses typos / fixé nous-même les prix et déterminé les mots-clés sur les pages parking.
Voila, désolé pour la longueur du post mais heureusement pour vous, c'était la dernière fois que je prenais position sur cette question sur un forum